Sénat de Belgique

SESSION DE 2004-2005

15 JUILLET 2005

Proposition de résolution visant à ramener les limitations de vitesse sur les routes dites secondaires de 90 km/h à 70 km/h

(Déposée par MM. Flor Koninckx et André Van Nieuwkerke)

DÉVELOPPEMENTS

1. Introduction générale

Ces dernières années, on a de plus en plus pris conscience de l'incidence de la vitesse sur le nombre et la gravité des accidents de la route. Deux éléments majeurs jouent un rôle à cet égard: la politique de surveillance et les limitations de vitesse. Dans notre pays, la vitesse maximale autorisée sur les routes secondaires est en règle générale de 90 km/h. Mais, les nouveaux objectifs que l'on s'est assignés en matière de sécurité routière ont conduit à limiter la vitesse à 70 km/h sur la plupart des voiries régionales, ce qui a nécessité le placement d'un grand nombre de signaux d'interdiction supplémentaires. Cette situation dans laquelle l'exception est en fait devenue la règle sème la confusion chez les automobilistes et les signaux présents en abondance détournent l'attention des usagers.

Il est recommandé, en cette matière, d'adapter la loi à la situation de fait.

2. Vitesse et accidents sur les routes secondaires

Selon une étude britannique de 1994, une diminution de la vitesse moyenne de l'ordre de 1 km/h permettrait de réduire de 3 % le nombre d'accidents et de 5 % le nombre de blessés graves et de morts.

Il ressort d'une autre étude britannique de 2000 que l'impact d'une réduction de la vitesse moyenne sur le nombre d'accidents est plus important sur les routes en zone urbaine que sur les routes de liaison.

Une réduction de la vitesse moyenne sur les routes de liaison a, à son tour, un plus grand impact qu'une réduction sur les autoroutes. L'étude montre par ailleurs que le risque d'accident augmente en proportion des différences de vitesses entre usagers.

Il ressort des chiffres de l'INS relatifs aux accidents de la circulation en 2001 que 4 557 des 47 444 accidents qui sont survenus sur les routes belges et qui ont entraîné des lésions corporelles, se sont produits sur les autoroutes et les échangeurs, que 22 209 de ceux-ci se sont produits sur les routes régionales et provinciales et 20 678 sur les routes communales; plus de 90 % des accidents ayant entraîné des lésions corporelles se sont donc produits sur les routes secondaires. En ce qui concerne le nombre d'accidents mortels, nous constatons que la proportion est à peu près identique: 193 tués sur les autoroutes, 821 sur les routes régionales et provinciales et 472 sur les routes communales. Une analyse plus poussée des chiffres montre que le nombre de morts par millier d'accidents ayant entraîné des lésions corporelles augmente de manière exponentielle quand la vitesse maximale autorisée passe de 70 km/h à 120 km/h:

Les résultats précités des études et de la recherche nous permettent de conclure que le nombre inhabituellement élevé d'accidents ayant entraîné des lésions corporelles ou ayant fait des victimes mortelles sur les routes secondaires est dû en partie au fait que la vitesse maximale autorisée est trop élevée.

3. La nécessité d'une nouvelle approche: le principe des 70 km/h sur les routes secondaires

Une limitation de la vitesse maximale à 90 km/h sur le réseau secondaire devrait être l'exception en Belgique plutôt que la règle. Les éléments qui plaident en faveur de cette thèse sont, notamment, la très grande densité de population, la grande densité du réseau routier, le phénomène typiquement belge de la construction linéaire le long des routes de liaison et, last but not least, l'évolution rapide de la situation de fait avec l'instauration de limitations de la vitesse maximale à 70 km/h sur la plupart des routes régionales et sur de nombreuses routes communales. L'instauration de ces limitations de vitesse de 70 km/h requiert une quantité énorme de signaux supplémentaires. Cela entraîne un coût élevé et, qui plus est, la multiplication excessive des signaux n'est pas de nature à favoriser la sécurité routière.

Une réglementation fixant la limitation de vitesse générale à 70 km/h permettrait d'éviter de devoir placer des signaux sur les routes où la vitesse n'a pas encore été limitée à 70 km/h, bien qu'une demande de limitation ait déjà été faite ou que l'intention existe de procéder à une adaptation en ce sens.

Dans les zones peu habitées qui sont dotées d'une infrastructure routière sûre, une vitesse maximale autorisée de 90 km/h peut être admise moyennant le placement du panneau C43/90 km.

Les chiffres relatifs aux distances de freinage et d'arrêt sont un argument supplémentaire en faveur de l'instauration d'une limitation de vitesse généralisée à 70 km/h. Il y a lieu de tenir compte de ces chiffres pour ce qui est des zones à densité d'habitat élevée, où les nombreuses traversées de voiries publiques et les manœuvres sont fréquentes.

Le tableau ci-dessous indique les distances de freinage et d'arrêt, compte tenu d'un temps de réaction d'une seconde sur chaussée sèche:

Sur chaussée humide, la distance de freinage est une demi-fois plus longue que sur chaussée sèche.

ANNEXE

Limitations de vitesse sur les autoroutes et les voies rapides dans 18 pays européens

Dans la liste ci-dessus, la Suède est le seul pays où la limitation de vitesse à 70 km/h est la règle sur les routes secondaires hors agglomération. Ce pays est le numéro 1 européen en matière de sécurité routière. Il y a dès lors de bonnes raisons pour la Belgique de suivre l'exemple suédois.

PROPOSITION DE RÉSOLUTION

Le Sénat,

A. vu la ferme volonté du gouvernement de réduire de moitié le nombre de victimes d'accidents de la route d'ici 2010, conformément aux objectifs du Livre blanc de l'Union européenne;

B. constatant que 90 % des accidents ayant entraîné des lésions corporelles et des accidents mortels en Belgique ont lieu sur les routes dites secondaires;

C. vu le lien clairement démontrable et démontré entre l'abaissement de la limitation de vitesse et la diminution du nombre de victimes d'accidents de la route mortels;

D. étant donné que l'évolution de la politique en matière de limitation de vitesse a abouti à une situation de fait caractérisée par l'imposition d'une limitation à 70 km/h sur la grande majorité des routes dites secondaires et qu'en conséquence, il a fallu placer de nombreux panneaux de signalisation C43/70 km supplémentaires,

demande au gouvernement d'instaurer une limitation de vitesse à 70 km/h comme règle générale pour les routes dites secondaires hors agglomération.

30 juin 2005.